mardi 8 mars 2011

La femme dans le christianisme

Le sacerdoce féminin est un sujet qui fait discuter beaucoup de religieux et de laïcs aussi.
Certaines églises chrétiennes, (parmi lesquelles Anima Universale)... prévoient des femmes ministres du culte, d’autres y sont opposées... et ces dernières soutiennent leur point de vue en apportant des arguments liés surtout à la tradition, c'est-à-dire à un usage qui, à leur avis, remonterait à Jésus et aux origines du christianisme.
Sur ce sujet j’ai trouvé intéressante l’œuvre du célèbre théologien Hans Kung qui, dans son livre « La femme dans le christianisme », expose le processus d’éloignement progressif par l’église catholique de la coutume égalitaire homme-femme qui caractérisait les communautés chrétiennes du 1er et du 2ème siècle.
Voilà quelques-uns des passages les plus éloquents de Kung que j’ai relevés:
Paul écrit à sa communauté des Galates : « Car vous tous, qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ. Il n’y a plus ni Juif ni Grec ; il n’y a plus ni esclave ni libre ; il n’y a plus ni homme ni femme, car tous vous êtes « un » en Jésus Christ ». Oui, il n’y a pas de doute que dans ses lettres Paul s’adresse expressément aux femmes comme à des « synergoi », ce qui signifie littéralement « collaboratrice » dans le sens de « collègue ».

…on pourra donc dire avec Elisabeth Schusslet Fiorenza : « La littérature paulinienne et les Actes des Apôtres nous permettent encore de reconnaître que les femmes avaient leur place parmi les missionnaires et les guides du mouvement chrétien primitif. Comme Paul elles étaient des apôtres et des guides et certaines étaient ses collaboratrices, elles prêchaient et rivalisaient dans la course pour l’évangile.. Elles fondèrent des églises familiales et, comme des patronnes éminentes, elles exercèrent leur influence en faveur des missionnaires et des chrétien(ne)s ».
Dans les différents chapitres du livre le théologien suisse met aussi en évidence la progressive destitution des structures « démocratiques » et « charismatiques » du christianisme des origines dans un processus d’institutionalisation croissante qui se développe toujours plus en faveur des mâles. Ainsi commence une « tradition chrétienne-occidentale » spécifique pour l’église qui est dirigée par l’évêque de Rome, qui exclut de fait la femme des fonctions ministérielles. Á ce propos Kung remarque :

Comment doit-on donc évaluer la tradition hostile aux femmes, si on la compare avec l’attitude fondamentale de Jésus, avec les communautés judéo–chrétiennes en Palestine et aussi avec les communautés païennes-chrétiennes d’inspiration paulinienne.
Les sources sont concordantes : les hiérarchies verticales ont commencé à créer toujours plus d’obstacles entre la fraternité et la sororité enseignées par Jésus aux premiers chrétiens.
Les études de Kung montrent donc que la femme a été exclue des fonctions sacerdotales non en relation avec la tradition originaire, mais plutôt qu’elle en a été progressivement éloignée (conformément à la tradition latine androcentrique suivante)... et cette exclusion fut faite pour structurer une hiérarchie ecclésiale verticale qui, de fait, demeurait étrangère aux communautés chrétiennes qui s’étaient formées tout de suite après la mort de Jésus.
La constatation de la distance entre ces études de Kung et le panorama historique bien différent dépeint par de nombreux autres savants, nous fait réfléchir.
Á ce propos c’est justement le célèbre théologien suisse qui souligne :
Aujourd’hui on sait que même l’histoire de la théologie et de l’église furent écrites surtout par les vainqueurs aux dépens des vaincus – du point de vue tant dogmatique que politico–ecclésiastique. Les vaincus, dans ce type d’histoire traditionnelle de l’église, ne sont pas seulement les seuls « hérétiques », que l’historiographie récente a réhabilités. Les vaincus sont aussi des parties entières de la chrétienté (…). C’est l’entière « autre moitié » de la chrétienté qui est vaincue : les femmes.
Il est facile d’imaginer que ces considérations de Kung ne reçoivent pas de sympathie au sein des religions « victorieuses » qui ont écrit l’histoire.

Le fait est que de nombreuses discriminations qui existent aujourd'hui au détriment de la femme, trouvent leur origine dans les traditions religieuses, dans lesquelles il y a aussi des « reconstructions historiques » profondément éloignées de la réalité.